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 "Odes" sont les paroles et musiques de la nature vosgienne tant chérie par mon père

Poèmes extraits du recueil "Odes" de Georges Garillon
~1990 ~

Je vous parle d'un pays ~ Moissons ~ Surgir ~ Cheminements ~ Le bleu d'un moment de ciel ~ Ma maison est sur la colline ~ Poème ~

   


Le bleu d'un moment de ciel


Silencieux esseulement des pierres trouant les terres
gisements vestiges géologies hors du temps et de l'espace
ici pièces et morceaux du passé innommable
là ornières creusements érosions des vents terrestres
marques rugueuses des charrois disparus
baisers d'écume et de cristal des eaux sans terme
sous l'écorce à l'infini de la glèbe à jamais fracturée
et le poudroiement invisible des glaises et des limons
Tenue verticale de la pierre étreinte de chaux et de ciment

Faîtages charpentes toitures tuiles et ardoises
maisons villages habitations écuries et greniers
cela fait la demeure des bêtes et des hommes
l'ordre l'écartement la distance d'une fenêtre à l'autre
par où les fleurs tournantes du soleil
passent du plancher au lit du tapis à la chaise
et remplissent d'or le souffle de la dormeuse
au visage ennuité où se tient le temps la part secrète
la noix verte de la soif la rose fanée de la peine

Une mélodie s'exhale infiniment du bois musicien
gémit sous les plafonds où s'empoussière l'instant
à jamais perdu à jamais caché de nos silences
esseulement des pierres dans les murs flamboiement
mûrissement du salpêtre rêve de gemmes de cristaux étoilés

Rayons invisibles d'un sourd besognement
qui cherchent à remplir l'espace à tenir la demeure

Les dés et les aiguilles de la brodeuse
les écheveaux multicolores les ciseaux clos
sont prétexte et mélodie au coeur de la travailleuse

Je prends l'escalier de la grande au grenier
de l pierre à la paille où se perd le poème
je prends l'escalier de la pierre à la paille
où se perd le poème sans métamorphose
retombant sous le sable et la rouille du sommeil

Mais sous la ténèbre des tilleuls
au porche rose de l'église à l'heure d'argent
voici le centre du village où se perpétue
le bouquet des saisons : boues orties et roses

et le paysage de porcelaine sous le globe du ciel
Entre les arbres aux chapeaux de feuilles
le bleu le bleu d'un moment de ciel
qui partout se tient hors d'atteinte
paysage céleste contrée de bleuets éclatants
jusqu'à l'horizon de collines où se meurent
la poussière des moissons la paille sans épi

La plaine des blés ici montrée toute
vers l'horizon à l'horizon sans fin renaissant
que rien ne peut déplacer
aucun regard aucun chemin aucun tonnerre
car partout il se tient
ici et là encore et toujours

Une caille s'enlève effrayée d'innocence
devant les chevaux qu'une voix mâle lance
vers la corne du champ où l'or des blés rougeoie
giration lente d'un espace sans fin
dans l'orbe astral des roues de la machine
la force rauque de l'animal armé de cuir
où chante le feu roux de l'été