Elle était pourtant belle. Mais
je n'ai pas réussi à l'appréhender, à écouter
ses hurlements de silence.
Sa peur des secondes ,des minutes, des heures, des jours qui trépassent
.
Mais c'est faux, avec le temps tout reste et s'ancre malgré vous.
J'avais bien pensé à lui dire des mots. Ceux qui font que les
gens se croient mieux après.
Encore un signe de leur folie éphémère. Mais c'est pour
leur bien.
Elle a finalement décidé de tuer le temps, son geôlier perfide.
D'après elle.
Et ma demoiselle s'est fort bien débrouillée pour l'éliminer
de sa compagnie,
le temps.
Il lui a suffit de pousser la porte de la salle d'attente. Un tout petit peu.
L'instant d'une éternité mais suffisamment trop pour laisser passer
un courant d'air, froid comme un mauvais songe. Sa peau s'est contractée,
son écorce a frissonné mais elle se décida.
Cette lourde, tellement lourde porte n'allait pas lui barrer la route. Elle
n'avait jamais voulu imaginé la suite et elle ne fut pas déçue.
Il n'y avait rien de nouveau, le temps se faisait toujours ressentir. Adversaire
oppresseur, ennemi pourri.
"Qui pourrit aussi ta vie..." se dit-elle.
J'aurais voulu qu'elle accepte, lui faire comprendre que ce temps affirmait
sa vie.
Mais c'était trop tard, je n'avais plus le temps.
Elle était pourtant belle, avec la vie devant elle. Mais elle en a décidé
autrement. A force de perdre son temps à vouloir le fuir,
c'est lui qui l'a rattrapé.
Sans se presser.
Cette fille croyait échapper au temps pour garder sa beauté, mais
sa beauté lui a échappée,
le temps l'a gardé.
Et moi je l'ai regardé,
vieillir avec moi,
cent ans.
Krystof